On sait que les changements climatiques ont une incidence sur une multitude d’activités humaines, mais on s’arrête rarement à ses répercussions sur les soins de santé. Pourtant, ils constituent un facteur de risque pour la santé, que ce soit par des effets directs (pensons aux maladies liées à la chaleur) ou indirects (par exemple la mauvaise qualité de l’air).
Réciproquement, le réseau de la santé a des impacts considérables sur l’environnement. Si les réseaux de la santé du monde entier étaient un pays, celui-ci se classerait au cinquième rang des plus grands émetteurs de CO2. Bien que la majeure partie de ces émissions proviennent des achats en médicaments et en équipement, les besoins énergétiques des infrastructures et les déplacements pour des raisons médicales sont à l’origine d’une part importante de celles-ci.
Au cours de notre récent webinaire, la chercheuse Nicole Simms faisait remarquer ceci : puisque le réseau de la santé a pour mission d’améliorer les résultats de santé, il se doit également de prendre des mesures pour atténuer les effets nuisibles qu’il a sur l’environnement et qui compromettent la santé même de la population.
Or, l’utilisation accrue des soins virtuels s’avère un excellent moyen de réduire les émissions de carbone. Selon un sondage mené par Inforoute en 2019, les Canadiens qui habitent en région rurale parcourent en moyenne 23,6 km pour se rendre au lieu où ils reçoivent habituellement leurs soins, tandis que ceux qui vivent en milieu urbain font en moyenne 13,1 km, deux distances beaucoup plus longues que le point d’équilibre nécessaire — de 4 à 7 km selon l’efficacité énergétique du véhicule — pour compenser les faibles émissions de CO2 générées par les soins virtuels [1].
Au Canada, la prestation virtuelle des soins serait particulièrement indiquée pour la réduction des émissions de carbone. Bien que la consommation de carburant du parc automobile canadien figure parmi les plus élevée dans le monde [2], notre énergie provient en grande partie de sources non émettrices de carbone [3]. Par conséquent, la prestation virtuelle des soins nous permet de remplacer les déplacements au moyen de véhicules non écoénergétiques par des technologies relativement propres. Si la moitié des consultations totales se déroulaient plutôt de façon virtuelle, on observerait une baisse de 325 000 tonnes métriques des émissions de CO2. Cela équivaudrait à retirer de la route plus de 70 000 véhicules de promenade pendant un an.
La moitié des consultations en mode virtuel, ça peut sembler beaucoup. Mais nous avons déjà franchi ce cap. Depuis le début de la pandémie de COVID-19, environ 60 % des consultations se sont effectuées virtuellement, que ce soit par vidéo, téléphone ou texto/courriel.
Les effets positifs sur l’environnement se feraient également sentir à l’échelle du réseau de la santé. Grâce à des études menées par le passé, nous savons que les patients ayant accès à leur information médicale se sentent plus à l’aise de s’occuper eux-mêmes de leurs soins, surtout dans le cas de maladies chroniques. Les soins virtuels constituent un excellent moyen d’améliorer la continuité des soins et de prendre en charge les problèmes de santé avant qu’ils ne s’aggravent. Des patients en meilleure santé nécessiteront moins d’hospitalisations et de visites à l’urgence, ce qui contribue à réduire encore plus les émissions associées à la prestation de soins.
En outre, la baisse des émissions entraîne une diminution des risques sanitaires causés par les changements climatiques. Et comme nous l’avons constaté, de meilleurs résultats de santé s’accompagnent d’une baisse de l’utilisation des services de santé et, par conséquent, des émissions. La chercheuse Nicole Simms décrit cela comme une « boucle de rétroaction positive », où les avantages pour les patients et l’environnement s’additionnent sans cesse.
La crise de la COVID-19 nous a amenés à repenser la manière dont nous donnons les soins. Si, après la pandémie, nous intégrons les pratiques de durabilité environnementale au secteur de la santé, nous pourrons mieux protéger la santé des gens et de notre planète. Ensemble, nous pouvons éviter que les changements climatiques provoquent la prochaine crise sanitaire.
Vous souhaitez poursuivre la discussion? Regardez l’enregistrement de notre webinaire How the Rise of Virtual Care is Contributing to Sustainable Healthcare (comment l’expansion des soins virtuels rend les soins de santé plus durables) et ne manquez pas l’Info-Balado sur la santé numérique du 4 août pour entendre Nicole Simms discuter avec Bobby Gheorghiu et Waldo Beauséjour.
[1] Holmner A., K.L. Ebi, L. Lazuardi et M. Nilsson. « Carbon Footprint of Telemedicine Solutions--Unexplored Opportunity for Reducing Carbon Emissions in the Health Sector », PLoS One, 4 sept. 2014, 9(9):e105040.
[2] Agence internationale de l’énergie (AIE). Fuel Economy in Major Car Markets: Technology and Policy Drivers 2005-2017, 20 mars 2019.
[3] Ressources naturelles Canada. Cahier d’information sur l’énergie, 2019-2020.
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