On se demande si FHIR n’est pas en train de priver en quelque sorte la santé numérique de son oxygène et on s’interroge sur les meilleures façons de l’utiliser pour améliorer les soins. Mais elle n’en demeure pas moins illogique, parce qu’elle repose sur une prémisse, parfaitement erronée, selon laquelle l’interopérabilité en santé numérique est un problème d’ordre purement technologique.
Tout d’abord, deux points doivent être précisés :
- FHIR d’HL7 est une importante norme informatique qui deviendra au cours des prochaines années la norme mondiale prédominante pour l’échange de données sur la santé;
- FHIR et IHE ne s’excluent pas mutuellement.
Normes et profils
Contrairement à HL7 (ou à ISO, à SNOMED ou à l’OMS, par exemple), IHE (https://www.ihe.net/) n’est pas un organisme de développement des normes informatiques en santé. Il s’agit plutôt d’un organisme de profilage des normes. Les Profils d’IHE sont des guides d’implantation — ils vulgarisent les normes et en facilitent l’utilisation et l’adoption. Ils décrivent, avec les détails voulus pour en garantir la conformité, la façon dont un ensemble de normes sera utilisé face aux problèmes d’interopérabilité touchant l’ensemble de l’écosystème et associés à un ensemble particulier de cas d’utilisation en santé. Les Profils d’IHE génèrent des composantes de base en santé numérique réutilisables fondées sur les cinq spécifications suivantes :
- Contexte de soins
- Contenu
- Codage
- Communications
- Confidentialité et sécurité
Approche ponctuelle ou écosystémique?
Pourquoi cette distinction entre les normes et les profils? Parce que la portée relative et les publics cibles d’une spécification FHIR ne sont pas les mêmes que ceux d’un Profil IHE (lequel peut, évidemment, renvoyer à des ressources connexes de FHIR).
La norme FHIR décrit les spécifications relatives au contenu, au codage et aux communications concernant des ressources en données sur la santé particulières. Les spécifications FHIR sont écrites à l’intention des ingénieurs logiciels. Le rôle des Profils d’IHE, cependant, consiste à décrire les comportements des participants d’un écosystème de santé numérique. En plus de référencer des données sous-jacentes, les Profils d’IHE décrivent le contexte dans lequel l’échange d’information se produira et les contraintes auxquelles cet échange est soumis en raison des mandats concernant la protection des renseignements personnels, la sécurité, la vérifiabilité, etc. Le public cible d’un Profil d’IHE est l’ensemble du réseau de la santé et, plus important encore, les entités qui gouvernent ce réseau et qui ont pour tâche de concrétiser une interopérabilité conviviale pour ses participants diversifiés. Le recours aux Profils d’IHE (par exemple pour les spécifications des DDP) leur permet d’y arriver.
Création et concrétisation de la valeur
L’engouement actuel suscité dans le marché par FHIR est tout à fait compréhensible; il s’agit assurément d’une nouvelle et emballante technologie d’échange de données sur la santé. Par contraste, IHE a pour rôle majeur de rendre tout à fait anodines d’importantes et complexes implantations en santé numérique. En effet, IHE aborde les dimensions sociales de l’interopérabilité en santé numérique dans l’ensemble de l’écosystème plutôt que ses seuls aspects techniques. Les Profils d’IHE éliminent toute optionalité des normes sous-jacentes. Les connectathons d’IHE sont des sources impartiales de données probantes en santé numérique, qui évacuent toute ambiguïté dans les spécifications et font ressortir les caractéristiques propres à chaque produit de leur implantation. IHE est centrée sur le déploiement à grande échelle des technologies de santé numérique et sur l’atténuation des risques qui en découlent.
Comme le disait William Gibson, « l’avenir est déjà là. Le problème, c’est qu’il ne profite pas également à tout le monde. » Assurément, certains diraient que la santé numérique peut être un atout pour un réseau de la santé moderne. Mais pour en récolter les fruits, nous devons déployer à grande échelle des solutions interopérables qui améliorent la continuité des soins, augmentent l’adoption de pratiques optimales concernant les soins et permettent aux provinces et aux territoires de réaliser des gains d’efficience et de rentabilité dans l’ensemble de leur réseau de la santé. L’adoption de technologies innovatrices peut certes produire de la valeur, mais pour réellement en récolter les fruits, c’est leur déploiement à grande échelle qui est la véritable innovation. Et on se retrouve alors au cœur même du rôle d’IHE : donner toute sa valeur à la saveur du jour… afin de rendre opérationnel l’écosystème interopérable de la santé.
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