Des visites à l’urgence évitées grâce au service d’aide par texto de Jeunesse, J’écoute

Par Ellie Yu

Dans un précédent message, nous avons parlé de l’expansion du service d’aide par texto Crisis Text Line propulsé par Jeunesse, J'écoute et des caractéristiques démographiques de ses utilisateurs. Ce service est accessible partout au pays. En un an seulement, on a compté plus de 140 000 conversations par texto avec des jeunes, ce qui a donné lieu chaque jour à plus de 10 sauvetages actifs et vies sauvées.

Des visites à l’urgence évitées grâce au service d’aide par texto de Jeunesse, J’écoute

Pour établir l’impact de ce service, nous avons étudié les conséquences financières de l’aide qu’il apporte aux jeunes et des interactions avec le réseau de la santé qu’il leur permet d’éviter.

Pour ce faire, nous avons examiné le nombre de consultations d’un professionnel de la santé que les répondants au sondage ont mentionné ne pas avoir eu à faire et avons estimé les coûts ainsi évités. Même si le sondage a permis de constater d’autres résultats (comme l’évitement de suicides ou de gestes d’automutilation), nous avons mis l’accent sur ceux qui concernent une utilisation directe du réseau de la santé, comme les visites à l’urgence et les consultations d’un professionnel de la santé de première ligne. Les données ainsi tirées sont particulièrement pertinentes pour les nombreux systèmes de santé qui, au pays, ont une capacité étirée au maximum et pour lesquels les délais d’accès à des services en santé mentale sont longs.

Nous avons évalué le nombre de visites évitées et les économies ainsi générées d’après les réponses à un sondage qui s’est déroulé de novembre 2018 à avril 2019. Au total, 4 % des répondants ont mentionné avoir évité de devoir aller consulter un professionnel de la santé durant cette période. Comme il y a eu plus de 60 000 conversations, on estime à environ 2 400 le nombre de visites ainsi évitées. Le coût moyen d’une visite à un professionnel de la santé de première ligne ayant été établi à 47 $1, selon un rapport publié en 2016 par l’Institut canadien d’information sur la santé (ICIS), on estime à au moins 110 000 $CAN les économies ainsi réalisées au cours d’une période de 6 mois.

On a utilisé la même méthode pour évaluer les économies obtenues grâce aux visites à l’urgence qui ont été évitées. Ainsi, de novembre 2018 à avril 2019, 6 % des répondants au sondage ont déclaré avoir évité de se rendre à l’urgence. À 60 000 conversations, ce chiffre représente donc 3 600 visites à l’urgence de moins. Le coût de chacune de ces visites étant fixé en moyenne à 166 $2, selon les chiffres publiés par l’ICIS dans son Rapport technique sur les facteurs d’accroissement des dépenses hospitalières, les économies ainsi obtenues sur une période de six mois se chiffreraient à 600 000 $CAN.

On estime à environ 713 000 $ les dépenses totales qui ont donc pu être évitées durant cette période de six mois par le réseau de la santé. Il convient de souligner que ces économies ne tiennent pas compte des autres effets dont nous avons parlé précédemment, comme le nombre de suicides et de gestes d’automutilations évités, ni d’autres limitations. De plus, nous n’avons pas évalué les coûts pour le réseau de la santé qui viendraient s’ajouter à la suite d’une visite chez le médecin ou à l’urgence (par exemple ceux qui ont trait aux services aux patients hospitalisés après leur visite à l’urgence). Inforoute entend continuer de faire le suivi des progrès du service d’aide par texto de Jeunesse, J'écoute et de ses effets sur les clients et sur le réseau de la santé.

Limites et hypothèses

Nous avons présumé que les réponses au sondage reflétaient les opinions de tous les utilisateurs. Le taux de réponse obtenu est d’environ 8 %. Les conclusions des sondages d’ACCÈS Santé d’Inforoute de 2018 et 2019 semblent confirmer notre hypothèse puisque les pourcentages de visites évitées au réseau de la santé (à l’urgence et au professionnel de la santé de première ligne) étaient similaires. En raison de la limitation des données, la présente analyse ne tient pas compte des dépenses qui ont pu être évitées par les sauvetages actifs de Jeunesse, J'écoute/Kids Help Phone. En effet, comme il nous était impossible d’estimer avec exactitude les coûts que pouvait représenter l’absence d’intervention active (en soins ambulatoires, en visite à l’urgence ou en hospitalisations), les économies que représentent les interventions actives n’ont pu être mesurées et ont donc été exclues de l’analyse.

Notre analyse présumait que si une personne signalait ne pas avoir utilisé un service, c’est qu’elle l’aurait autrement utilisé. Il convient aussi de souligner qu’un répondant pouvait cocher de multiples cases concernant une visite évitée. Par exemple, il pouvait mentionner que les services de Jeunesse, J'écoute lui avaient permis d’éviter une consultation chez un professionnel de la santé ainsi qu’une visite à l’urgence. Nous n’avions aucune façon d’établir l’importance ou la priorité relatives des suggestions de réponses qui avaient été cochées. Il est tout à fait possible que les répondants aient eu l’intention de visiter les deux, mais nous n’avions aucun moyen de nous en assurer. Les répondants auraient alors été comptés dans deux catégories : ceux qui ont évité une visite à l’urgence, et ceux qui ont évité une consultation chez le médecin. De plus, nous n’avions pas accès à de l’information d’identification, qui nous aurait permis de repérer les utilisateurs répétés (par exemple ceux qui ont utilisé le service d’aide par texto de Jeunesse, J'écoute à plusieurs reprises), et ne pouvions de ce fait identifier les « utilisateurs intensifs » et déterminer leurs opinions et leur impact sur le réseau de la santé. Enfin, les visites à l’urgence et les hospitalisations évitées ne représentent pas tant des économies pour le réseau de la santé qu’une libération bien nécessaire de leur capacité.


1. Les Médecins au Canada, 2016.
2.Rapport technique sur les facteurs d’accroissement des dépenses hospitalières.


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À propos de l'auteur
Ellie Yu

Ellie Yu

Ellie Yu est analyste du rendement chez Inforoute Santé du Canada; elle facilite la prise de décisions d’affaires, en analysant des données et des renseignements organisationnels, en vue de justifier l’adoption des solutions de santé numériques et les investissements connexes. Elle détient un doctorat en politique de la santé de l’Université McMaster.